see you again (lenny)

Depuis quelques jours, la solitude de Darragh s'était partiellement rompue avec le retour en ville de son ami de toujours, Matthew. Ce dernier, acteur, était de retour en ville pour écrire le scénario de la prochaine saison de la série dans laquelle il jouait en venant sur sa terre natale avec toute l'équipe de production : acteurs, maquilleurs, producteurs, figurants, stylistes. Après le service du midi et avoir aidé à nettoyer la salle, Darragh avait décidé de passer à l'improviste pour voir son meilleur ami. Ils s'étaient peu vus, en coup de vent. Une pizza devant un vieux films à discuter, deux heures tout au plus puis un café ici et là, rien de plus. Il avait envie de passer du temps avec lui mais également de voir comment se déroulait un tournage ; ses rêves d'acteurs et de comédiens étaient avortés depuis des années, depuis qu'il avait été exclu de l'école d'art de la scène, dès la première année, il y a huit ans. Darragh enfourcha sa moto pour rouler jusqu'au lieu gardé secret du tournage mais que Matthew lui avait révélé. La sécurité l'emmerda aussitôt et Darragh tenta de garder son calme. Pour prouver sa bonne foi, il montra plein de photos de lui et de l'acteur qui ne trompaient pas : il ne pouvait pas être un fan. Un des agents qui passaient par là le reconnu même et fut capable de dire aux personnels de sécurité que Darragh était écossais. Le serveur dévisagea l'agent. Matthew parlait donc de lui ? « Matt n'est pas là mais si tu veux voir le tournage », proposa-t-il. Une proposition qu'en tant qu'amoureux du cinéma et des planches, que Darragh ne pouvait refuser ; ainsi, suivant les pas de l'agent qui se prénommait Phil, il pénétra dans le lieu sécurisé, les yeux ébahis et brillants de rêveries. C'était merveilleux, tout ce dont il avait toujours rêvé : costumes, caméras, maquillages. Il fronça des sourcils en passant devant la caravane du maquillage devant laquelle se tenait, de dos, une grande brune. La même chevelure corbeau que la fille à qui il ne cessait de penser depuis une semaine, cette fameuse Lenny. Darragh secoua la tête. Cela ne pouvait pas être elle. Il devait probablement hallcuiner.

Une nouvelle journée où il est impossible de compter les heures. Ce métier est aussi excitant qu’exténuant. Une énième retouche avant la prochaine scène. Les décorateurs terminent leur travail alors que je le débute. Débout depuis six heures du matin. Présente autour de la caravane à sept heures. Fort heureusement, la série ne demeure pas farfelue. En admiration devant les maquilleuses de The walking dead qui passent des heures sur un figurant. Aurais-je la patience ? Probablement pas. Je me sens à mon aise dans cet univers. Un maquillage simple, sans artifice. Certes, les défis existent pour être tentés. Pour l’instant, je savoure ce chance. Les acteurs principaux sont en train de répéter la scène. Un secondaire a besoin de mes services. Je surveille mon chien, endormi près de la table réservée aux accessoires. Il ne se rend pas compte de sa chance. Je le garde auprès de moi s’il y a un problème. Plusieurs crises autrefois, seule, en pleine détresse. Il est entrainé pour ce genre d’intervention. Nous sommes unis par un amour qui défie tous les autres. Cet animal est mon plus proche compagnon. Confortable dans cette tenue décontractée. Des converses pour maintenir le pied. Les joies de travailler dans l’ombre. Impossible de rester debout toute la journée avec des talons. Je vais chercher une autre teinte pour la peau de l’actrice et c’est à cet instant que je le vois. Cet homme rencontré il y a une semaine. Je ne pensais pas le retrouver. Comment est-il entrer dans ce lieu si fermé ? Un hasard surprenant. Nous ne devions pas nous croiser à nouveau. Je lui esquisse un sourire avant de demander deux minutes à l’artiste. Un pas assez ferme pour me situer à un mètre de lui. « Salut. Comment es-tu entré ici ? » Cet endroit est très secret. Eviter les journalistes qui souhaitent obtenir des images. Beaucoup trop de fuites. Je le regarde, les bras croisés. Un peu gênée face à cette situation. « C’est assez.. inattendu de te revoir. » Après la soirée à se chercher du regard, nous avions terminé où je loge pendant le tournage. Un motel assez simple. Je ne peux nier que son regard m’avait troublé. Cependant, nous avions bien été d’accord pour que cette histoire dure qu’une seule nuit..